68 c’était il y a longtemps et pourtant chacun d’entre nous a déjà vibré à la connaissance des évènements ayant marqués une année devenue emblématique. Certains l’ont vécu, d’autres, comme moi se le sont fait raconter. Cela ne nous empêchera pas de marquer l’anniversaire de cette année synonyme d’envie et d’espoir.
Traditionnellement, la mémoire retient les évènements ayant secoué la France au mois de mai, des combats acharnés, un réveil citoyen et une alarme sociétale.
Oui mais... 68 s’inscrit dans une dynamique bien plus large recouvrant toutes les dimensions d’une société à la dérive. En 68, c’est la société de « papa », une époque où l’homme au boulot la femme à la maison raisonne comme une religion (aujourd’hui 15% d’écart salarial subsiste encore entre hommes et femmes), une année où une éducation religieuse et refreinée domine, un temps où une forte hiérarchie écrase les désirs de chacun.
68 c’est aussi l’année où MLK et Bob Kennedy furent assassinés, l’un luttait pacifiquement pour une égalité entre noirs et blancs, l’autre dénonçait publiquement la guerre du Viêt Nam et soutenait la lutte en faveur des droits civiques, la justice sociale et l’égalité.
En 68 s’opère également un changement de mentalité où l’immobilisme engendré par un affrontement est-ouest étouffe la société dans toutes ses composantes. Au coeur de cet affrontement se trouvera notamment le printemps de Prague où l’idéal égalitaire communiste se manifeste par un totalitarisme écoeurant, un évènement qui conduira certains d’entre vous à construire un mouvement plus solidaire qu’une certaine gauche et plus libertaire qu’une certaine droite merci !
En effet, en tant qu’écologistes, c’est avec une certaine émotion que nous fêtons les 40 ans de ces évènements, Dany le vert est là pour en témoigner, la mutation culturelle qui s’opère en 68 va créer un climat favorable à l’émergence d’une nouvelle culture politique axée sur la solidarité et sur l’autonomie. Une philosophie qui se construira en fonction des dérives constatées à cette époque.
Parallèlement, 68 c’est le coeur de ce qu’on a appelé les trente glorieuses, l’empire de la consommation prend le pouvoir, la surproduction est devenue le mot d’ordre et la planète donne ses premiers signes d’épuisement
68 et l’écologie politique ont ouvert une nouvelle voie à la recherche de solutions à dégager pour un avenir durable. Ainsi, le combat pour la solidarité passera de l’égalité des citoyens en tant que telle à une égalité des chances entre ces citoyens mais aussi à une reconnaissance personnelle.
Comme tout anniversaire, celui du 40ème anniversaire de 68 doit, aujourd’hui, nous permettre de faire un pas en avant. L’idée n’est pas pour nous de dire « ô comme c’était chouette, ils avaient de la chance » mais plutôt de regarder ces évènements avec un regard critique. Car 68 c’était avant tout l’émergence de cet esprit critique, ne tombons pas dans l’erreur en contemplant béatement un évènement désormais historique.
En 2008, notre vigilance ne se pose plus sur les mêmes dérives mais sur ses héritières. 68, c’était un combat contre le capitalisme industriel, dominé par des grands patrons, mettant face à face des catégories de travailleurs bien distingués. En outre, les enjeux étaient plus évidents qu’aujourd’hui, où il est bien plus difficile d’identifier un « adversaire » clair.
68 était une victoire, mais une victoire qui a complexifié la société et donc fait changer ses enjeux et ses moyens de lutte pour transformer la société. C’est pourquoi afin de saluer cet anniversaire, je voudrais citer un slogan de l’époque : « Ne nous attardons pas au spectacle de la contestation, mais passons à la contestation du spectacle ».
Je voulais ici, en héritier de ces luttes, saluer un changement culturel fort mais également appeler à regarder vers l’avant pour une société plus juste et une terre plus verte...
Par: Pierre CASTELAIN (Secrétaire Régionale Ecolo Liège)Localisation: Liège-Faubourg Ste Marguerite pierre.castelain@ecolo.be