La semaine dernière, L’Auberge de Jeunesse Georges Simenon fêtait le 75ème anniversaire du mouvement en Belgique. 75 ans après l’épopée des Auberges de Jeunesse et des premiers congés payés (Si bien dépeints dans les oeuvres de Fernand Léger: Cf. ci-contre “Loisirs populaires”), l’occasion était belle de revenir -en cette veille de congés estivaux sur fond de baisse du pouvoir d’achat- sur le sens que nous donnons encore aujourd’hui aux vacances et au tourisme...
En 75 ans les choses ont bien changé, avec 300 millions de touristes dans les années 80, 900 millions en 2007 et près d’un milliard annoncés pour 2010 … le secteur touristique, dont l’essor demeure permanent, est aujourd’hui l’une des plus grande industrie du monde. Par an, 15 000 avions sont affrétés pour déplacer les touristes à travers le monde selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), 40 000 avions seront nécessaires d’ici à trente ans. Le tourisme de masse n’a sans doute jamais aussi bien porté son nom. Toutefois, même si le tourisme vit une sorte d’apogée, soulignons que quatre Belges sur dix ne partiront pas en vacances cette année…
Des loisirs populaires de l’été 36 au all-inclusive consumériste des années 2000
L’accès aux vacances qui était perçu jusqu’il y a peu encore comme une avancée sociale majeure issue du mouvement ouvrier -Via les congés payés, la réduction du temps de travail, l’augmentation du niveau de vie et de l’accès aux loisirs pour tous- est en passe de se transformer en une désillusion sociale et environnementale.
A terme, en effet, l’accroissement du nombre de touristes entraînera de facto une hausse de la demande en énergie, eau et ressources naturelles. Ce constat est particulièrement alarmant dans les pays où les infrastructures sont défaillantes. « Douches, bains, piscines et arrosage des pelouses des hôtels ponctionnent souvent lourdement les réserves d’eau locales, alors que les habitants en manquent pour leur usage personnel ou pour l’irrigation », relève la journaliste Béatrice Dehais, citée par le hors-série «Le Tourisme autrement » d’Alternatives Economiques. Et de poursuivre : « L’implantation d’activités touristiques modifie également l’équilibre du milieu naturel. Les prélèvements et les rejets des touristes sur un site influent sur la qualité des eaux. L’érosion du littoral est devenue critique dans de nombreux pays (Tunisie, Inde, Philippines). Sans Encore, selon le programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), les 3/4 des dunes du litoral méditerranéen ont disparu en raison de l’urbanisation touristique. Autant d’atteintes aggravées par une fréquentation concentrée dans le temps et l’espace. Sans oublier les bouleversements sociaux et culturels que le flot toujours plus dense de vacanciers occasionne.
Parcourir la terre et la protéger...Forces et difficultés de l’écotourisme
Devant une telle situation, différents acteurs nationaux et internationaux, producteurs et consommateurs de tourisme, ont commencé à envisager des modes alternatifs au tourisme de masse. Sous le terme générique de « tourisme responsable », plusieurs courants, souvent d’essence associative, sont nés au cours des dernières décennies tels, pour ne citer qu’eux, le tourisme vert, le tourisme équitable et solidaire, le tourisme social, le tourisme durable, le tourisme éthique et l’écotourisme.
L’écotourisme revêt des formes diverses puisqu’il recouvre les activités de loisirs et touristiques dont l’objectif est d’être le plus possible respectueuses de l’environnement : cadre naturel, historique et humain. Ce dernier, qui dans son esprit est proche du tourisme durable, favorise la recherche du contact avec la nature, les paysages ou des espèces remarquables, tout en respectant les écosystèmes parfois même en contribuant à les restaurer. L’activité écotouristique comporte, le plus souvent, un volet d’éducation à la préservation de l’environnement et aide à faire prendre conscience de la nécessité de protéger le capital naturel et le capital culturel. Il se donne aussi pour objectif d’avoir un impact environnemental positif et de contribuer au respect et au bien-être des populations locales et de leurs cultures traditionnelles.
Au passage, l’on pourrait dire que l’écotourisme constitue un « pléonasme » dans la mesure où il devrait être la règle ! Ceci dit, identifier une activité de type écotouristique n’est pas chose aisée. Des professionnels du secteur touristique l’utilisent aussi comme manière d’allégation comme le relève Jean Pierre Giotard chargé de recherche du pôle Tourisme de l’Université de Paris III (Ainsi, participer à une randonnée dans la forêt équatoriale, est-ce écotouristique si, entre les étapes, les touristes sont véhiculées en 4x4 ? A contrario, pourquoi ne pas comptabiliser dans ce secteur les personnes qui font du ski de fond ?)
Il reste que si nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir occuper notre temps libre sans trop détruire la planète, tirer profit des inégalités nord-sud ou piétiner la culture de l’autre, cette façon de voyager concerne encore peu de gens et touche principalement les catégories financièrement et culturellement aisées de la population. Rappelons ainsi les résultat d’une récente étude commandée par le journal La Meuse mettant en avant un nouveau phénomène: le recours croissant des Liégeois au crédit à la consommation désormais proposé par les agences de voyages en matière de financement des vacances. Notons également que pour les plus défavorisés, cet accès aux vacances n’est pas de mise, voire sanctionné par les CPAS maniant parfois l’arme de la suspension du Revenu d’Intégration Sociale (RIS) en cas d’absence de plus de 3 semaines du territoire national... Pour les uns, le turbo-consumérisme et les pièges du surendettement; pour les seconds la stigmatisation parfois, l’impossibilité financière souvent!
Du global au local: moraliser le secteur, refinancer les organisations de loisirs populaires
Sans doute, à l’image de ce qui s’est produit dans l’agriculture biologique, faudrait-il que les gouvernements développent des normes et une réglementation spécifiques pour organiser et « moraliser » le secteur. L’écotourisme est une forme de tourisme qui est à inscrire dans une démarche écoresponsable. Dans cet esprit, il est sans doute nécessaire de réfléchir à la mise sur pied d’une gouvernance mondiale dans ce domaine. La création d’une agence ou d’une mission internationale du tourisme qui serait peut-être placée sous l’égide de l’Organisation des Nations unies (ONU) avec pour objectif l’examen des urgences et les priorités, sachant que les méthodes et les outils existent et que les objectifs sont désormais universels.
Par delà ces pistes d’action globales, la revalorisation du secteur des organisations proposant (ou envisageant) l’accès du plus grand nombre à un tourisme ecoresponsponsable à l’image des Auberges de Jeunesse mais également des mutualités semble être une piste locale pertinente. La création d’une agence nationale des vacances annuelles (liée à l’ONVA) développant, soutenant des projets d’écotourisme (pour toutes les bourses avec une attention particulière pour les bas revenus) et communiquant aux citoyens via des antennes décentralisées pourrait également constituer une piste de réflexion pertinente afin de réinjecter du sens et surtout, de la pratique à nos congés payés.
Pour vos vacances, retirez votre Passeport Vert!
Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) a lancé, en mars dernier, une nouvelle campagne internationale pour apporter des conseils « verts» aux voyageurs internationaux. « Le passeport vert » a pour but de faire prendre conscience aux touristes qu’ils peuvent, eux aussi, contribuer au développement durable en optant pour des vacances responsables.
Cette initiative s’inscrit dans la mobilisation en faveur de l’accélération de l’évolution vers une consommation et une production durables née du Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg, en 2002.
Les conseils pratiques concernent toutes les étapes du voyage : de la préparation des bagages au retour à la maison. Le passeport vert encourage, par exemple, les touristes responsables à réduire la consommation d’énergie sur la route et à l’hôtel, et à acheter des souvenirs locaux et sans impact sur l’environnement. Bref, voyager vert semble à la portée de tous: Pour retirer votre passeport vert: http://www.unep.fr/greenpassport/
Par: François BERTRAND (Membre Ecolo Liège/Coordination) Localisation: Liège-République Libre d'Outremeuse francois.bertrand@agora.eu.org